Iran
Dans la salle du petit déj’, les Allemands arrivés hier soir en bus sont installés. Peu de conversation, l’Allemand n’est pas volubile. Ça se décide un peu quand j’équipe la moto devant le bus. Surprise, le jeune couple allemand brièvement croisé à l’hôtel de Sanandaj était ici, et on se recroise brièvement (ils ne sont pas avec le bus). Quand je récupérerai mon passeport plus tard, le manager de l’hôtel qui m’a vu leur parler, me confiera tout bas : «Ils ne sont pas mariés» d’un air désapprobateur.
Je prends la route vers le château de Takht-e Soleyman, comme d’habitude, une montée de quelques dizaines de mètres et le paysage s’ouvre dans la lumière du matin, c’est grandiose.
Ce qui est moins grandiose, c’est l’état de la route, j’avais pensé que pour un site de cette importance un effort aurait été fait, hé bien non.
Dans un village, un rond-point décoratif a été installé, pile au milieu et sur toute la largeur de la route bitumée, et pour passer, bâ il y a les bas-côtés en terre. Cela n’empêche tout de même pas de mettre des ralentisseurs sauts-de-puce…
Takht-e Soleyman est un site bluffant. Apparence de ruine totale quand on arrive, mais plus on s’approche, plus la majesté du lieu s’impose.
Le lac et en fond, la citadelle de Zendan-e Soleyman.
Et puis, une fois l’entrée passée, en approchant du centre, le lac apparaît, et c’est alors la magie du lieu d’origine qui opère, toute cette colline est formée par les sédiments que la source chaude a déposés au cours des âges. Une simple faille et l’eau chargée de carbonate de calcium et de sels de soufre a créée sa propre fontaine, en imitant les montagnes qui l’entourent.
Les corridors couverts qui mènent au temple du feu zoroastrien sont très bien conservés.
Les ywans (grands porches voûtés) n’ont pas résisté au temps.
L’eau qui sort du lac (en fait une fontaine) rejoint le village en contrebas, et la pierre rouge qui s’est formée naturellement pour constituer cette sorte de canal est appelée pierre dragon. Ça le fait, hein, Séverine ?
Zendan-e Soleyman, citadelle, oui, prison, on ne sait pas vraiment, volcan, non, c’est la même formation géologique que le lac, mais cette fois, il n’y a plus d’eau.
Aucun empire ne durera plus qu’un empereur, ensuite, le palais revient aux corbeaux et aux pies, rois et reines des tas de pierre épaulés de béquilles.
Je reprends la même route qu’à l’aller pour rejoindre Myandoab et un pont sassanide, Pol Myrza Rasawl. En chemin, je trouve une partie de ma mission pour Jean-Claude, une décharge sauvage…
Passons…
Le parcours est ainsi fait, plaine ou plateau, puis descente en lacets dans une vallée parfois escarpée (donc c’était plateau) et on grimpe de l’autre côté. Dans cette région, on extrait de gigantesques carrières (les zones blanches sur les collines) des blocs de calcaire blanc qui feront ces belles sculptures et statues que l’on voit partout (si ce n’est pas Ferdousi, c’est Avicenne ou Marie, ou un dauphin, ils aiment bien aussi).
Je recroise mon panneau « cerf », enfin ! Les trois messieurs près de la Peugeot là-bas m’ont dit que les bestioles étaient là, en montrant juste la colline d’à côté. Ils m’ont aussi bien précisé qu’ils étaient kurdes.
Après la photo du panneau (il est beau, hein ?), je rentre dans un pot-au-noir terrible, tout d’un coup, le ciel qui cumulonimbussait tranquillement s’est transformé en encrier, et à peine 2 km plus loin, c’est pluie noire, 12°C, vent tourbillonnant et ceci juste dans une longue descente étroite, mal viroleuse et défoncée. C’est peut-être la cause de cette drache, en fait, j’arrive au bout de la montagne, et le nuage bute et précipite. Bin moi aussi, je me bute et je me précipite à travers. Je connais mes Heidenau maintenant, je prends de l’angle comme il faut sur le mouillé, pour arriver au plus vite de l’autre côté de la pluie.
C’est un de ces moments que seuls les amoureux de la moto peuvent comprendre (je crois), on en bave, mais on maîtrise, et on sent très finement la limite à ne pas dépasser.
J’ai eu raison, ça se calme dès que la plaine (c’en est bien une, il y a de grosses rivières) est là.
Un peu chien (ou chat) mouillé quand même, je me trouve un resto dans Shahindezh, très sympa, petite soup.
Ca fait du bien et ça permet de repartir sec et en forme.
Voici ce joli pont sassanide, Pol Myrza Rasawl, qui me paraît bien menacé par de grands travaux routiers ou zonindus…
Maintenant la direction, c’est Tabriz, et à un moment il va falloir bifurquer à droite pour atteindre Kandowan.
En attendant, toute la région est très urbanisée et très industrielle, la circulation s’en ressent. Ici, à Bonab, ce pauvre policier devait gérer un carrefour bien encombré par une section d’autoroute perdue, montée sur piliers, et qui ne va nulle part en venant de c’est pas là. Tout le monde tourne autour, passe dessous, klaxonne, s’infiltre…
Une fois passé cette ville, la voie express monte et dans la descente suivante, vue sur le lac d’Ourmia, visiblement à sec, et les îles au loin ne paraissent îles qu’en raison de la chaleur qui fait vibrer l’air et lui donne l’aspect de l’eau.
Je n’ai pas pu m’arrêter pour prendre une photo, il y a bien une bande d’arrêt d’urgence (et pour une fois des glissières) mais elle est empruntée par les véhicules lents, et les véhicules très rapides. Trop risqué.
Arrivé enfin à Kandowan, galère pour trouver la guesthouse de Nasser…
Je n’ai que son numéro et pas de téléphone opérationnel. Je demande à quelques jeunes qui ont l’air citadins. L’un d’entre eux appelle et me dit que Nasser va arriver. En fait ce n’est pas Nasser mais une sorte de guide/manager de la zone touristique qui me conduit à travers les ruelles (il n’y en a que trois) jusqu’à une maison. Une femme ouvre et me montre la chambre, pas de parking, pas de wifi…
Bâbr-i Siyâh est dans la rue, petite rue, et à l’écart certes, mais dans la rue.
Je rédige le blog hors ligne et je traite une partie des photos.
Je vais traîner dans le village et dans la zone des boutiques à touristes. C’est l’heure de la fermeture, il n’y a plus que moi comme touriste, alors je suis hélé de partout. Je passe un moment avec un petit groupe, un ancien et trois jeunes, autour d’un brasero fait dans un bidon de 10 litres d’origine indéterminée (huile d’olive ?) on m’offre le thé, évidemment, et le patriarche fume la houka. Il me montre la manip en choisissant des braises de la bonne taille dans le bidon. Les inévitables Paris, Zeïdane (sic), PSG… Moi je sors les miennes, Peugeot, Paykan…
Je trouve un resto en plein air et c’est un dizi, mais j’ai montré la taille, alors ça va, ils ont compris (vu que le plat n’est pas spécialement diététique). Celui qui a l’air d’être le boss parle un anglais qui me va, et il m’indique quelle simcard prendre à la place de Irancell, et surtout où. J’aviserai demain.
Retour à la guesthouse, je vais trouver la femme en bas et je lui demande d’appeler Nasser. Il va venir dans 5 minutes. Bonhomme qui me fait penser, jusqu’au costume, à Coppé. Il est avec son gamin, genre 4 ans, mais qui sait monter sur une moto. Je tente d’expliquer à Nasser, par geste, que je voudrais abriter la moto pour la nuit. Il me passe un gars au téléphone et dans un anglais pidjin on se comprend. Il y a un garage en face, Coppé/Nasser téléphone et le gars vient ouvrir, sort la voiture et s’en va en me laissant la clef pour demain matin. Nickel.
Tranquillisé, je m’installe un petit lit avec 3 matelas et deux couettes. Je me réveille vers 3 heures, tout est encore éclairé dehors, bâ quand le pétrole n’est pas cher…
Ça caille mais je suis bien dans mon lit-nid, il ne me manque qu’une chose, la maison.
Saluche, ouaip c’est sympa la « hooka/houka » hein? 🙂
Si vraiment t’as apprécié, j’pourrais te refiler la mienne, elle vient direct du marché d’Istanbul ^^. Rien qu’à voir ta photo tout sourire, j’imagine que ça t’a détendu et que ça t’a refilé la pêche !
Ce château devait être vraiment bien à visiter…. Encore un endroit que tu me fais personnellement découvrir. Je n’en avais jamais entendu parlé, mais ça c’est normal pour le paumé que je suis X). Encore merci pour ça ! Et… j’espère bien que tu as pris beaucoup plus de clichés que ceux présents sur cette page. Ca a l’air bigrement alléchant.
Par ailleurs, je vois une construction suspendue à la montagne (photo du village), tu t’es renseigné pour savoir ce que c’est ? Est-ce une mine ?
T’as l’air correctement acclimaté aux mœurs du pays. Ca fait sourire, tu dois être on ne peut plus agréable et marrant, « détendu ». J’aimerai bien te voir ainsi et pouvoir partager un bon moment raplapla, j’répète j ‘ai la « houka » nécessaire 🙂
T’inquiète pas, la maison et tes amis t’attendent, mais rentre pas trop vite, prend le temps de profiter encore un peu !
@++ Porte toi bien 🙂